En principe, Horace de Vere Cole est supposé avoir été un poète anglo-irlandais mais personne ne se souvient de ses vers. Ce n’est pas qu’ils étaient mauvais ; c’est plutôt que Cole a produit quelques œuvres bien plus mémorables : ses canulars. #Thread
Son premier fait d’arme remarquable remonte à ses années d’études au Trinity College de Cambridge. Avec Adrian Stephen, son complice de toujours, ils avaient appris qu’Ali bin Hamud, le Sultan de Zanzibar, était en visite officielle à Londres.
Et là, dans l’esprit de ces deux loustics, émerge une idée totalement farfelue : ils vont se faire passer pour le Sultan et son oncle qui font du tourisme à Cambridge.
Leur mode opératoire est extrêmement simple : ils envoient un télégramme officiel annonçant leur arrivée au maire de Cambridge et, accompagnés de trois autres étudiants, se déguisent et débarquent par le premier train venu de Londres.
Bah ça a marché comme sur des roulettes : le maire les a accueillis en grande pompe et leur a même organisé une réception officielle à la mairie.
Ils ont même réussi à se débarrasser d’une missionnaire retraitée qui, manque de bol, parlait arabe en lui expliquant qu’elle n’avait pas le droit de parler au Sultan… à moins de rejoindre son harem. #SiSi
Évidemment, Cole s’est empressé de raconter tout ça au Daily Mail : ça lui a valu une haine féroce et éternelle du maire de Cambridge mais c’est aussi le début de sa célébrité.
À partir de là, il multiplie les canulars : il se fait passer pour le premier ministre Ramsay Macdonald et se lance dans des diatribes virulentes contre son propre parti, il organise le creusement de tranchées en plein Piccadilly (etc…)
Mais Cole reste sur sa faim : il lui manque un coup d’éclat, quelque chose d’encore plus fort que l’affaire du Sultan de Zanzibar.
C’est là qu’il apprend que le HMS Dreadnought, navire amiral de la Home Fleet et fierté de la Royal Navy, est au mouillage à Portland Harbour, à côté de Weymouth dans le Dorset.
Ça, c’est une cible de choix.
Le Dreadnought, à l’époque, c’est l’orgueil de la Navy. C’est un énorme cuirassé qui, technologiquement, est tellement en avance sur son temps qu’il va donner son nom à toute une génération de navires et provoquer une course aux armements en Europe.
Le plan de Cole est simple : on va refaire le coup du Sultan de Zanzibar mais, cette fois-ci, en se faisant passer pour des princes d’Abyssinie (i.e. d’Éthiopie) en visite officielle en Angleterre et se faire inviter à bord du Dreadnought.
Distribution des rôles : Cole sera « Herbert Cholmondeley » du Foreign Office, Adrian Stephen jouera les interprètes tandis que sa sœur Virginia (la future Virginia Woolf), Guy Ridley, Anthony Buxton et Duncan Grant se feront passer pour des princes Abyssiniens.
Ils décident de passer à l’action le 7 février 1910.
Maquillés, affublés de fausses barbes et déguisés avec des tuniques et des turbans ridicules fournies par un copain costumier de théâtre, nos six trublions se présentent à Waterloo.
Jeu : devinez qui est Virginia Stephen sur la photo.
.
.
.
.
.
.
Oui, elle est assise à gauche.
Là, Cole rédige un télégramme : « Prince Makalen d’Abyssinie et suite arrivent aujourd’hui à 16h20 à Weymouth. Il souhaite voir le Dreadnought. Arrangez rencontre à l’arrivée. Désolé improviste. Oublié télégraphier avant. Un interprète les accompagne. »
Il adresse ça au Commandant en Chef de la Home Fleet, c’est-à-dire au vice-amiral Sir William May (#WhyNot?), en signant « Harding Foreign Office » pour Sir Charles Hardinge, sous-secrétaire du Foreign Office (re-#WhyNot?).
Dans la foulée, jouant son rôle de représentant du Foreign Office, il se débrouille carrément pour qu’on leur affecte une voiture spéciale, digne de hauts dignitaires étrangers en visite en Angleterre.
Et les voilà partis. Évidemment, ils ne savent pas du tout si leur télégramme va être pris au sérieux et s’attendent à se retrouver comme des imbéciles sur le quai de la gare de Weymouth.
Forcément, quelqu'un va vérifier auprès du Foreign Office...
La Navy, trop heureuse d’afficher sa puissance, a mis les petits plats dans les grands : on leur déroule littéralement le tapis rouge et ils sont accueillis à la gare par le capitaine Herbert Richmond accompagné d’une garde d’honneur et même d’une fanfare.
Comme personne ne connait l’hymne d’Abyssinie (et pour cause, il ne sera composé qu’en 1926), on leur jouera *The Dover Castle March* à la place (certaines sources parlent de l’hymne de Zanzibar mais c’est peu probable).
Forcément, nos princes sont ravis et comme il faut bien qu’ils fassent part de leur contentement dans une langue qui, avec beaucoup d’imagination, pourrait être celle d’Abyssinie, ils s’exclament en cœur « Bunga ! Bunga ! »
C’est-à-dire qu’ils avaient bien potassé rapidement un manuel de swahili dans le train mais c’était un peu court. Du coup, ils inventent au fur et à mesure un joyeux mélange de latin, de grec et d’autres langues anciennes et modernes.
Les voilà donc embarqués à bord du Dreadnought pour la visite. Devinez qui va leur servir de guide officiel…
…
…
…
…
Oui, c’est l’amiral May himself qui s’y colle.
Sur le pont, il commence à pleuvoir un peu. Du coup, les princes font comprendre à leurs hôtes qu’ils aimeraient voir l’intérieur fissa (en fait, ils ont surtout peur que ça fasse couler leur maquillage.)
Et la visite se poursuit comme ça pendant 45 minutes avec l’amiral May à la manœuvre.
À chaque fois qu’ils voient un truc épatant, les princes s’écrient « Bunga ! Bunga ! » et les officiers de la Navy, qui ont pigé que c’est plutôt positif, sont ravis.
Avant de repartir pour la gare, un des princes tente même d’épingler une décoration de pacotille sur un jeune gars de la Navy — visiblement sans succès.
Revenus à terre, les quatre princes et leurs accompagnateurs prennent le train de 18h heure pour Londres : personne, pas même un des cousins d’Adrian et Virginia Stephen qui était à bord, n’a compris que c’était un canular.
Ce n’est que deux jours plus tard que la Navy va découvrir le pot aux roses… par voie de presse : la photo des « princes » fait la une des journaux de Londres et, vous vous en doutez un peu, tout le monde sauf les gars de la Royal Navy se marre.
Avec le temps, la Navy finira par prendre l’affaire avec humour. Quand, le 18 mars 1915, le Dreadnought devient le seul cuirassé à avoir éperonné et coulé un U-Boat allemand, un télégramme le félicite au cri de « BUNGA BUNGA » #Fin
Si vous avez aimé cette histoire, il y en a plein d’autres ici :
External Tweet loading...
If nothing shows, it may have been deleted
by @ordrespontane view original on Twitter
• • •
Missing some Tweet in this thread? You can try to
force a refresh
Fin octobre 1941, les services de renseignement britanniques sont en alerte maximale : il semble que les nazis aient finalement réussit à infiltrer des agents en Angleterre ; on vient d’intercepter les messages du chef de leur réseau, un certain ‘Arabel’. #Thread
Dans ses messages interceptés par les brits, Arabel avertit ses maîtres de l’Abwer (le renseignement militaire nazi) qu’un convoi de la Royal Navy a quitté la baie de Caernarvon, au pays de Galles, et fonce désormais dans l’Atlantique, droit vers le sud.
Détail troublant, néanmoins : ce convoi n’existe pas. Même pas en rêve.
Suis à Chamonix. C’est plein d’étrangers. Des britanniques (en masse), des néerlandais, des allemands, des espagnols, des russes, des japonais, des chinois, des indiens...
Comme je suis un habitué, je peux vous confirmer que tout ce petit monde vient ici pour profiter de la montagne. On les retrouve sur les chemins de moyenne montagne ou, pour les plus sportifs, en haute montagne.
Seule exception : les arabes (les vrais hein, ceux qui viennent de la péninsule). Eux, ils restent en fond de vallée, là où il y a des boutiques de luxe.
En 1996, Alan Sokal, professeur de mathématiques et de physique, a eu une idée amusante : écrire un monument de pseudoscience et le faire publier dans une revue de ‘sciences sociales’ postmoderne. #MiniThread
Le point principal de Sokal, c’est que l’idée selon laquelle il existe une réalité objective, indépendante de nous, dont nous pourrions comprendre les lois grâce à de (« prétendues ») méthodes scientifiques est en réalité un dogme imposé par les intellectuels occidentaux.
Or, note l’auteur, un certain nombre de « percées conceptuelles récentes » montrent que « la ‘réalité’ physique est au fond une construction sociale et linguistique » et que le discours dominant relayé par la communauté scientifique…
Voilà la situation : vous êtes sur une portion d’autoroute limitée à 90 km/h (qui pourrait être, par exemple, l’A51 entre Aix-en-Provence et Marseille, aujourd’hui vers 15h10. [1/x]
Évidemment, comme vous avez un permis de conduire standard, vous respectez cette vitesse maximale scrupuleusement. Genre, vous roulez au régulateur pour être sûr de ne pas vous rendre coupable de violence routière.
Fatalement, la voiture devant vous roule à 85 km/h. Du coup, vous la rattrapez petit à petit et finissez par la doubler sur la voie de gauche (comme il se doit) mais lentement parce que 5 km/h d’écart ça ne fait pas une grosse différence.
Pour celles et ceux qui s’intéressent à la guerre du Vietnam, je ne saurais que trop recommander 'The Vietnam War: A Film by Ken Burns and Lynn Novick' sur Netflix. C'est magnifiquement fait et extraordinairement intéressant.
De l’aide militaire apportée par Truman au français dès septembre 1950 à la chute de Saigon en avril 1975, les États-Unis sont quand même restés dans ce bourbier pendant près de 25 ans et sous 6 présidents (Truman, Eisenhower, Kennedy, Johnson, Nixon et Ford.)
En terme d’engagement de troupes sur place, on est passé des 900 ‘conseillers’ d’Eisenhower, à 16 000 gars à la mort de JFK puis à — tenez-vous bien — 543 482 hommes et femmes à la fin de la présidence de Lyndon Johnson.