Suite aux propos écoeurants de @dupontaignan (coutumier du fait quand il s’agit de #prison ), petit fil sur un sujet peu connu : les mères en prison, et donc les bébés et les très jeunes enfants en prison. Réinformation #detention#maternite
Rappelons ce dont il s’agit : 100 000 euros ont été débloqués pour 10 places pour une « crèche » (je reviendrai sur le sens du mot dans le fil, il ne faut pas s’imaginer que c’est comme à l’extérieur) à Fleury-Mérogis, pour les bébés qui vivent en prison avec leur mère
Dupont-Aignan s’indigne, déclare que le «confort des délinquants» est la «priorité du gouvernement», à la charge du contribuable. Rappelons qu’il s’agit de place pour des bébés et de très jeunes enfants qui ne sont pas des délinquants, sauf si on considère que c’est génétique...
Il fait par ailleurs un parallèle bizarre avec les « téléphones portables en cellule », merci pour cette intox, c’est toujours interdit en détention (même si des personnes détenues en font entrer clandestinement, ce qui est l’objet de sanctions)
Je vais parler de la maternité et des enfants en prison, mais rappelons quand même que Dupont-Aignan qui s’indigne qu’on débloque 100 000 euros pour des enfants, et parle du « confort » de la prison était le plus riche des candidats à la présidentielle 2017
Dupont-Aignan qui trouve que la prison est trop confortable pour les bébés de détenues a 6 biens immobiliers à Paris+une maison dans l’Essone par ex. Un de ses appartements parisiens vaut 1,3 millions d’euros. Mais le vrai scandale, c’est débloquer 100 000 euros pour des bébés…
Dupont-Aignan, qui plaint le pauvre contribuable lorsqu’il s’agit de donner un peu d’argent pour le quotidien de bébés en prison, est grassement payé comme député par ledit contribuable depuis des années et a embauché sa femme comme assistante parlementaire pendant 20 ans...
Revenons à la maternité en prison. Des femmes enceintes sont incarcérées, et accouchent en prison (contrairement à l’intox qui veut qu’une femme enceinte ne soit pas emprisonnée…). D’autres peuvent tomber enceintes en prison (cas de « bébé-parloir », voire de viol…)
Une détenue peut garder son enfant avec elle jusqu’à l’âge de 18 mois. Cela peut s’appliquer à plusieurs cas 1)L’enfant qui naît en prison 2)Lorsqu’une femme est incarcérée alors qu’elle a déjà un bébé très jeune, elle peut demander à ce qu’il reste avec elle jusqu’à ses 18 mois
Ca choque souvent les gens lorsqu'on leur dit que des bébés peuvent naître et grandir en prison. C'est un sujet très compliqué, et d'ailleurs la législation varie beaucoup: en Allemagne on peut garder l'enfant jusqu'à 6 ans, dans d'autres pays du tout
La législation essaie de prendre en compte le bien-être de l'enfant (et nullement, comme le dit D-A, le "confort" des délinquants). Généralement, on essaie de chercher d'abord toute solution pouvant éviter l'accueil de l'enfant en milieu carcéral, mais ce n'est pas si facile
Les gens qui disent "elles n'ont qu'à confier le bébé au père ou à la famille" me font bien rire. Vous connaissez drôlement bien le milieu social de la majorité des personnes détenues pour dire un truc pareil. Des solutions alternatives ne sont pas toujours possibles
Il y a aussi des cas où le très jeune enfant peut très mal vivre la séparation avec la mère (somatisation très importante), on considère qu'il est meilleur (ou moins pire...) pour lui de rejoindre la mère en détention
Autre cas très problématique: si la mère n'est en détention que pour quelques mois. Faut-il que l'enfant puisse la rejoindre ou non? Sachant que c'est un environnement traumatisant pour l'enfant mais que la séparation brutale peut être aussi traumatisante
Concrètement, comment se passe la vie d'un bébé en détention. De 9h à 14h et de 14h à 17h, les mères et enfants peuvent être au quartier nurserie (un peu plus large, avec une petite cour). Mais le soir et la nuit, la mère et le bébé sont enfermés en cellule
Normalement la cellule mère-enfant doit être au minimum de 15m2, ce qui n'est pas toujours respecté (quel "confort", n'est-ce pas Dupont-Aignan!) avec un accès à l'eau chaude (pas tjs respecté). Le bébé est donc bien enfermé (ce qui pose des problèmes, par ex l'accès aux soins)
Le bébé fait donc l'expérience de l'enfermement. C'est très violent. Surveillants et surveillantes le racontent: quand l'enfant grandit, il tape aux portes, il crie "non, non" quand la porte se referme sur lui...
La prison affecte le développement de l'enfant, bien sûr. Par exemple la vue: l'enfant ne voit jamais très loin (à cause des grillages et des barbelés). Il est traumatisé par les portes, par le bruit. Son développement moteur est affecté.
Parlons des fameux "quartiers nurseries". Dupont-Aignan joue sur le réflexe "ah lala les détenues ont des places en crèche alors que moi à l'extérieur je galère". Il ne s'agit pas de "crèches" comme on l'imagine.
Il s'agit d'espaces un peu plus larges, repeints en clair ("confort"!) avec une petite cour de promenade (ouverte à certains horaires). Il y a quelques jeux. Il n'y a pas de personnel. Ce sont les femmes détenues qui s'occupent elles-mêmes de leurs enfants.
Rapport du contrôleur sur la nurserie de la MA de Bordeaux: elle mesure 4,80m x 4,10m, la petite cour est jonchée de détritus (sacs, mégots que certains lancent des fenêtres), il y a des trous faits par des rats, le seul jouet à disposition pour les enfants est un petit toboggan.
Ce sont souvent des lieux sales. Témoignage de cette détenue via l'@OIP_sectionfr , qui expliquait que le premier mot que son fils avait dit était "mouche" (à cause des poubelles): oip.org/temoignage/mer…
Inutile de vous dire que ce n'est pas un environnement épanouissant. D'autant plus que les mères doivent 1) soit s'occuper de leurs enfants, et elles ne peuvent pas travailler ni suive une formation, elles restent donc pauvres, coincées 2) soit le confier à une co détenue.
Parce que oui, les personnes détenues peuvent et veulent très souvent travaillées (mais sont complètement exploitées, pas de droit du travail en détention). Je reposte un fil sur le sujet:
L'intérêt de la nouvelle "crèche" de Fleuy-Mérogis serait justement que du personnel professionnel de l'extérieur prenne en charge (en partie) les enfants: quatre agents du CCAS de la ville. Mais pour ça il faut débloquer des moyens.
Bref, l'accueil des bébés en prison révèle bien les défaillances de notre système: pas de structures pour les accueillir à l'extérieur, pas de vraie structure à l'intérieur. Alors qu'ils n'ont RIEN fait. La "crèche" de Fleury-Mérogis est un premier pas, mais très insuffisant
Qu'un multi-propriétaire richissime comme @dupontaignan ose parler de "confort" pour des "délinquants" quand on voit comment grandissent les bébés en prison, comment leur avenir est tout de suite handicapé, alors qu'ils n'ont rien fait, est absolument écoeurant
Bien sûr, quand on naît en prison, quand l'Etat ne nous prend pas en charge, on part mal dans la vie... J'ai vue une femme revenir comme détenue dans la prison où elle est née, et c'est vraiment une des choses les plus tristes possibles. On ne naît pas sous la même étoile.
Quelques citations de l'oeuvre Romain Gary, le seul écrivain à avoir eu deux fois le prix Goncourt, une fois sous le nom de Gary, et une fois sous le nom d'Ajar, une des plus belles supercheries stylistiques de l'histoire de la littérature
"Qu'est-ce que c'est, le fascisme ?-Je ne sais pas exactement. C'est une façon de haïr"
"La liberté est fille des forêts.C'est là qu'elle est née,c'est là qu'elle revient se cacher, quand ça va mal"
"Il n'y a pas d'art désespéré. Le désespoir, c'est seulement un manque de talent"
"J'aime tous les peuples, dit Dobranski, mais je n’aime aucune nation. Je suis patriote, je ne suis pas nationaliste.
– Quelle est la différence ? -Le patriotisme, c’est l’amour des siens. Le nationalisme, c’est la haine des autres" (Education européenne)
Dix idées reçues sur la langue, et pourquoi elles sont fausses ou inexactes. Fil entièrement basé sur le petit livre de M. Yaguello "Catalogue des idées reçues sur la langue" (il y en a plus que 10!) très bon ouvrage introductif sur la langue (bref et facile à lire) #linguistique
Idée reçue n°1: On peut savoir combien il y a de langues sur terre.
En réalité, les critères de distinction pour savoir ce qu'est une langue et ce qui n'en est pas n'est pas aisé. Les distinctions entre "patois" "dialecte" "langue" sont plus politiques que linguistiques.
Par exemple le catalan ne sera considéré par certains (certaines personnes, certains pays) que comme un "patois" (une manière de le discréditer bien sûr), pour d'autres, c'est une langue.
Petit fil sur un paradoxe (suite à des discussions avec @Melusine_2 et @LIndeprimeuse ) : comment expliquer qu'alors qu'on se définit comme progressiste, voire gauchiste, ou tout simplement non réac, on fait généralement preuve de conservatisme en ce qui concerne la langue?
D'abord, quelques petites précisions. Ce qui est particulier en linguistique, par rapport à d'autres domaines, c'est que puisque nous sommes des sujets parlants, nous avons toutes une pratique de la langue, donc une idée de la langue, des jugements de valeur sur la langue
Les sujets parlants ont tendance à investir de la langue de plein de choses qui ne sont pas la langue, c'est-à-dire des valeurs affectives qui viennent de leurs expériences, des préjugés qui viennent de leur époque ou de leur groupe social (je cite ici la linguiste M. Yaguello)
Est ce que vous connaissez le mot "schibboleth"? En français cela veut dire "épreuve décisive" ou "signe de reconnaissance". Mais originellement, le "schibboleth" désigne une mise à l'épreuve linguistique. Et si on rate, on meurt. Petit fil #linguistique
Le schibboleth apparaît pour la première fois dans la bible: la tribu de Galaad combat la tribu d'Ephraïm. Quand les Ephratiens et Ephratiennes tentent de fuir, par les rives du Jourdain, ils leur demandent de prononcer "schibboleth" (qui signifie "épi").
Ceux et celles d'Ephraïm n'arrivent pas à prononcer la chuintante et disent "sibboleth" et sont mis à mort. "La différence linguistique (...) devient le lieu où s'incarne la haine de l'autre, le lieu de la discrimination"
Parce qu'en réalité, ce n'est pas l'écriture inclusive ou l'éducation sexuelle qui menacent l'école aujourd'hui, mais les conditions d'enseignement : fil sur la situation des profs et élèves du #lyceemozart (93), dans (certains) bâtiments sans chauffage, aération ou toilettes.
Les élèves et profs du lycée Mozart du Blanc-Mesnil (93) dénoncent régulièrement des inégalités de traitement (par exemple autour de #Parcoursupmarianne.net/societe/la-ban…). Mais là, le combat est très concret: ça fait 5 ans que le lycée se mobilise pour... avoir le chauffage
Les travaux promis depuis 5 ans (!!!) n'ont pas été faits. Profs et élèves ne savent pas du tout quelle sera leur situation cet hiver. Est-ce normal qu'au 21e siècle, dans la 7ème puissance mondiale, un lycée ne soit pas chauffé? La région compte sur le réchauffement climatique?
Les règles d'accord du participé passé que nous connaissons n'ont pas toujours existé (on croit toujours que le français que nous parlons, que nous écrivons, dont nous connaissons -ou pas- les règles a toujours été tel quel, mais c'est faux),elles se sont imposées vers le 16e-17e
Voltaire disait ainsi de Marot «Il a ramené deux choses d’Italie : la vérole et l’accord du participe passé. Je pense que c’est le deuxième qui a fait le plus de ravages». #punchlinegrammaire (cité dans la tribune qui a relancé le débat: liberation.fr/debats/2018/09… )